Une des Figures politiques les plus importantes de l’ile, Joseph Lagrosillière surnommé « Pé Lagro » est très peu connu de l’ensemble des martiniquais, et pourtant de nombreuses rues de communes de la Martinique portent son nom. Qui est cet homme qui a bouleversé le paysage politique martiniquais ?
Joseph Lagrosillière est né le 2 Novembre 1872 à Sainte Marie. Il est issu de la petite bourgeoisie de couleur. Il vient d’une famille de propriétaires aisés. Lagro comme on le surnommait, faisait de brillantes études secondaires au lycée colonial de Saint-Pierre. Il part en France pour effectuer des études de droits à l’école coloniale de la faculté de droit de Paris. Il s’intéresse à Jean-Jaurès et devient l’ami de jules Guesde. Dès 1896, il milite à Paris dans le groupe socialiste des Antillais. Il obtient une licence en droit, devient avocat et s’inscrit le 29 Juin 1898 au barreau de Paris et de Tunis.
De retour à la Martinique, il commence à informer les masses du Nord de la Martinique, des solutions socialistes que doivent exiger les ouvriers pour améliorer leur situation. Il s’inscrit en 1901 au barreau de Fort-de-France en tant qu’avocat et deviendra le bâtonnier de l’ordre à fort de France. La même année, il crée la première Fédération socialiste de la Martinique et devient ainsi le leader du mouvement ouvrier en Martinique. Puis il fonde le journal le Prolétaire, dont il est le rédacteur en chef. Il est à l’origine de la naissance du syndicat agricole de Sainte-Marie en 1907. Joseph Lagrosillière exerce en même temps, le métier d’exploitant agricole (terres familiales) et de commerçant. Il combat le cléricalisme
En 1902, il est candidat socialiste aux élections législatives dans la circonscription Nord de Martinique mais la catastrophe du 8 Mai 1902 stoppa les processus. L’éruption de la montagne Pelée fut un drame dans sa vie puisque sa femme et toute sa famille disparurent dans la catastrophe. IL s’en alla à Saint Pierre et Miquelon pendant deux ans pout tout oublier et pour exercer son métier. Il continua son combat militant.
Il revient à la Martinique et est élu conseiller général du canton de Sainte Marie. En 1910 il devient maire de Sainte Marie et remporte la même année les élections législatives dans le nord qui est la 2ème circonscription de la Martinique. Il bat Fernand Clerc (un usinier). Il prend la direction du journal « Le prolétaire ». A l’assemblée nationale, Joseph Lagrosillière se bat pour que les lois du code du travail soient appliquées à la Martinique (apprentissage, contrat de travail, salaire, conseil des prud’hommes, congés…). En désaccord sur la vision de l’assimilation, avec les députés socialistes, il démissionne en 1913 du groupe de l’assemblée nationale. En Février 1913, Lagro se sent insulté par le procureur général de la Martinique Jules Montel; il le défi en duel mais trop âgé Montel se fait remplacé par son fils qui sera battu par Lagrosillière (en chemise claire) plus expérimenté.
Joseph Lagrosillière est très populaire ; en 1914 il réélu député et élu maire de Sainte-Marie (Il le restera jusqu’en 1936). Il sera battu en 1936, aux élections municipales de Sainte Marie par son deuxième adjoint Rodolphe Richer mais gardera son poste de député. Avec le député guadeloupéen Achille René Boisneuf, il propose en 1915, à l’assemblée nationale une loi pour faire des colonies françaises des départements mais ce fut un échec.
Il s’allie en 1919 à l’usinier Fernand Clerc.la rencontre eut lieu à Sainte Marie lors du célèbre « banquet de Sainte Marie » Ce fut un choc dans le monde politique. Il est cependant élu député du Sud de la Martinique et devient président du conseil général.
Il est mêlé à des affaires de fraudes électorales et de troubles à l’ordre public. Il est emprisonné et ne peut se présenter aux élections législatives de 1924.
Lagrosillière, a participé à quelques duels, Dans la vidéo, Liontel sera le plus jeune des deux (chemise plus foncée) et Lagrosillière, (chemise plus claire). Lagrosillière était choqué par un article écrit par le procureur général de la Martinique, Jules Liontel en Février 1913. Il réclama réparation en le provoquant en duel mais l’âge de Liontel (61 ans) l’empêchait de combattre. Il fut remplacé par son fils. Lagrosillière remporta le duel en blessant au bras son adversaire.
La suite de son combat politique reste une des périodes les plus troubles de sa carrière. Il interrompt sa carrière politique. Il est arrêté en 1931 et est écroué au Havre pour trafic d’influence et corruption de fonctionnaires. Il reste pourtant populaire chez la masse des travailleurs et regagne son siège de député en 1932 puis en 1936.Il devient à nouveau président du conseil général de 1934 à 1939 puis de 1943 à 1945. Il quitte La SFIO en 1933 qu’il avait rejoint en 1928.
Il publie des articles dans la revue L’Union Française. Il mène son dernier combat, après la libération, lors des municipales de Fort De France en 1945 contre Aimé Césaire à Fort-de-France. Battu sévèrement, sa carrière politique s’arrête à la Martinique. Lors du congrès de la SFIO, en Juillet 1948, il est réintégré dans le parti.
Aujourd’hui son héritage est encore présent à Sainte Marie : le monument aux morts, l’ école de Bezaudin construite en 1927, le morcellement de Fonds Saint Jacques en 1934 et surtout, l’édification du hameau du Morne Des Esses en paroisse en 1932 sont quelques unes de ses œuvres .
Joseph Lagrosillière intervient pour l’amélioration de la situation des indiens ; il obtient pour ces derniers le droit de vote et c’est lui qui fit disparaitre cette interdiction de dépasser le Pont Rouge de Sainte Marie ; ce pont qui apparaissait comme étant le pont de la ségrégation.
Il décède à Paris à l’âge de 77 ans, le 6 janvier 1950. Sa dépouille mortelle arrive à la Martinique le 16 Mars. Elle est exposée au Conseil Général. Ses funérailles ont eu lieu le 18 Mars à Sainte-Marie.
Aujourd’hui un collège et une rue portent son nom à Sainte Marie
Camille Darsières rend Hommage à Joseph Lagrosillière dans l’émission de Mano RCI en 1996
Cet article est un hommage à Camille Darsières en particulier , Edouard Delépine et Jean Claude William qui ont fait connaitre l’œuvre de Joseph Lagrosillière
Lerandy Luc
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