Le Tombolo est un mot d’origine italienne qui désigne cette flèche de sable qui relie l’îlet de Sainte Marie à la terre. Pour Pascal Saffache, ce phénomène est la résultante de plusieurs facteurs hydrodynamiques marins. Il est lié à l’action des houles, marées et courants marins. Les pêcheurs désignent le tombolo par l’expression « la digue ».
De Juillet à Novembre lors de la saison des pluies, le débit des rivières augmente très fortement. L’instabilité aérologique favorise l’immersion du tombolo. On ne voit plus ce passage permanent qui est recouvert par la mer. Seul l’écume des vagues permet de le localiser.
Les houles des mois de Novembre à Décembre ,en s’écrasant sur l’îlet Sainte Marie, transportent des sédiments (sable, gravier, et galets) vers la partie la plus protégée de l’ îlet (sous le vent de l ’îlet). Il se forme ainsi un cordon sédimentaire qui relie l’îlet à la plage (les anciens pêcheurs parlent du phénomène de Jubilé de la Toussaint) . Une longue houle de Nord-Nord-Est énergétique qui a balayé le Nord Atlantique durant le mois de Décembre a provoqué un transport exceptionnel et important de sable depuis l’Anse Madame jusqu’à l’ilet. Ce phénomène très dérangeant pour les pécheurs et les baigneurs a eu un effet positif pour la construction du tombolo ; il s’est constitué rapidement et est plus large cette année.
D’autres facteurs interviennent à la fin de l’année. Vers les mois de décembre et en se rapprochant du mois de Mars, avec la raréfaction des pluies, les rivières presque asséchées, la faiblesse des courants marins, le tombolo va émerger et petit à petit la traversée de la plage à l’ilet sera encore plus agréable. On peut même, certains jours l’emprunter pour se rendre sur l’îlet sans se mouiller les pieds. Le tombolo a une longueur d’environ 100 mètres.
Situé sur le périmètre de la Forêt domaniale, l’îlet a fait l’objet d’une étude et d’un aménagement réalisé par l’office national des forêts. Il appartient donc à l’état et est géré par l’ONF. C’est un espace naturel qu’il convient de protéger.
Cité par Mrs Saffache et Marc dans l’ouvrage intitulé « Le littoral martiniquais dans la littérature scientifique », l’îlet a connu plusieurs phases dans l’évolution de son paysage mais qui sont surtout liées aux activités de l’homme et à l’érosion naturelle.
Ces chercheurs citent P. Monnier, qui dans sa cartographie, parle de l’îlet comme d’un espace composé d’escarpements à pic et d’une surface plane herbacée. Les anciens nous parlent effectivement d’une surface très plane sur laquelle ils jouaient au football
Eugène Revert en 1947, dans son ouvrage « géographie de la Martinique « parle de l’érosion très forte de l’îlet.
L’îlet de Sainte Marie était, jusqu’à son exploitation économique (port, culture) parfois non contrôlée (élevage sauvage),un espace boisé et herbacé. On y trouvait une petite plantation de canne à sucre appartenant à un certain Montbrun Darius.
L’îlet est composé de deux mamelons : le mamelon ouest de 29 mètres de hauteur était occupé par un port (voir article dans rubrique Histoire). On y trouve encore aujourd’hui quelques vestiges. Une croix domine le mamelon Est qui est haut de 39 mètres et qui est devenu le lieu de ponte des Sternes de Dougall. Ces oiseaux migrateurs arrivent au mois d’ Avril et pour les protéger, cette partie de l’îlet est fermée dès le 1er Avril. Entre les deux mamelons on trouve un passage ou corridor plat qui fait 80 mètres de longueur.
Vers la fin des années soixante, les habitants du bord de mer et les pêcheurs ont fait de l ’îlet un lieu d’élevage sauvage de cabris, cochons, poules… Ces animaux ont détruit le couvert végétal et accéléré l’érosion. Le passage du cyclone Dorothy en 1970 a aggravé la situation. Dans les années quatre-vingt, sous l’impulsion du maire Guy Lordinot, ces pratiques ont été interdites.
Aujourd’hui en parcourant l’îlet, on découvre des essences comme le poirier pays, le raisinier, les pois bord de mer, les patates bord de mer, des cocotiers…
Au niveau de la faune, on peut découvrir quelques oiseaux : malfinis ( une sorte d’aigles), tourterelles, sternes de Dougall (qui font l’objet d’une protection particulière), pélicans… mais on trouve aussi des escargots comme les soldats. Autour de l’ îlet vivent à quelques centimètres de l’eau des brigauds, cocos de mer et divers escargots. Les sternes de Dougall forment une colonie d’environ 200 couples qui sortent chaque année, d’Amérique centrale ( la Colombie) et arrivent au début du mois d’Avril pour nicher sur le mamelon est de l’ilet. Ces oiseaux très rares sont en voie de disparition. Les sternes nichaient avant sur Le Pain De Sucre qu’ils ont abandonné depuis 1998 à cause des rats, pour occuper l’ilet Sainte Marie.
En 2011, la municipalité de Bruno Nestor Azérot et son office du tourisme (OSATOURC) mènent une réflexion quant au devenir de l ’îlet en collaboration avec l’ONF.
Maitre d’ouvrage, l’ONF entame des travaux d’aménagement, et aujourd’hui l’ilet est sécurisé : l’accès aux deux mamelons est protégé. La population de sternes est protégée en période de nidification. Un ponton de débarquement est construit (très utilisé par les marins pêcheurs). Les zones érodées sont restaurées, la croix de l ’îlet est renforcée, une signalétique est installée, sans oublier un point d’accueil qui, depuis la plage, guide les visiteurs. Les travaux ont été menés sous le contrôle et par l’ONF avec le concours de la municipalité, les collégiens, les associations, les marins pécheurs ainsi que les habitants.
Aujourd’hui, l’îlet et son tombolo sont devenus l’une des premières attractions naturelles de la Martinique. Ce sont des milliers de visiteurs qui l’empruntent chaque année notamment lors de la saison touristique.
Lerandy luc